La nuit venait à peine de tomber sur Londres.
Après des dizaines et des dizaines de minutes d'errance, Lucrécya s'assit sur les marches qui menaient à la petite résidence où elle et son mari vivaient à présent.

-Je savais que j'aurais du visiter l'université avant le jour de la rentrée, pesta-t-elle.

Elle jeta un regard morne à Mali, qui, accroupie devant elle, tremblait de tous ses membres.

Un énorme grondement, en direction des bâtiments de cours, lui fit lever la tête.
On aurait dit qu'on venait d'arracher une montagne de la terre. Puis, le sol se mit à vibrer, comme au rythme des pas d'un géant massif lourd de plusieurs tonnes.

-Mais qu'est-ce que c'est que ça ?! glapit-elle, un peu effrayée.

Malicia se mit à claquer des dents. Et c'est alors que Lulu réalisa que la façade de la maisonnette d'en face était blanche, et surplombée d'une grande croix rouge.

-Rha c'est pas vrai, je tourne en rond depuis des heures et depuis le début c'était en face de chez moi ?!

Elle attrapa le bras de son amie, et entra d'un pas ferme dans le dispensaire.

-Hé ho ! Y'a quelqu'un ? J'ai un empoisonnement à une potion hallucinogène ou un truc du genre ! lança-t-elle en poussant les portes battantes du bâtiment.

Mais l'endroit était totalement désert. C'était une sorte d'accueil aux murs blancs aseptisés, baignant dans une odeur entêtante de formol. Lulu passa une porte fermée par un simple rideau, et écarquilla les yeux.

Des rangées et des rangées de lits s'alignaient devant elle. Tous remplis d'étudiants gémissant, blessés, à la tête horriblement déformée ou bien aux membres devenus à moitié invisibles.

Une infirmière passa en trombe sans faire attention à elle, en ronchonnant :

-La rentrée, c'est toujours le pire jour de l'année ! Saletés de fraternités !

-Excusez-moi ! EXCUSEZ-MOI ! lança Lulu, en la suivant.

La copie conforme de l'infirmière s'approcha d'elle :

-Désolée, ma p'tite demoiselle, mais là on est un peu débordées !

La jeune fille désigna son amie, qui pleurait à chaudes larmes en débitant des phrases sans aucun sens.

-Mais Mali est…

Elle n'eut même pas le temps de finir sa phrase que la deuxième infirmière était déjà repartie administrer ses soins à une jeune fille gonflée comme un ballon de baudruche, qui flottait au dessus de son lit.

Lucrécya soupira :

-Vous en faites pas pour nous, hein, on va s'débrouiller!

Elle tira Malicia vers une petite pièce au fond, sur laquelle était écrit "Pharmacie".
Elle farfouilla sur les étagères de fioles et de flacons colorés :

-Je sais exactement ce qu'il te faut : une potion de Requinquance ! Quand j'étais à Beauxbâtons, j'en avais volé un carton entier à l'infirmerie. Je m'en servais pour aller en cours les lendemains de cuite ! Ah, ce qu'on se pintait les soirs de victoire au Quidditch…

Elle soupirait d'aise à ce souvenir, puis elle fouilla à nouveau les médicaments.

-Ah ! Ca y est ! Bois ça !

Elle ouvrit un petit flacon, qui émit aussitôt une fumée pourpre étrange, et le fourra dans la bouche de Malicia.

Mali ouvrit grand les yeux et, se tenant la gorge avec les mains, se mit à tourner en rond dans tous les sens:
-CA BRULEEEEE!!!
Lucrécya fronça les sourcils :
-Hein mais, ça brule pas d'ha...
Elle lut les petits caractères en bas du flacon, et qui signalaient "concentré de requinquance, une goutte par patient" :
-Oups...
-AAAAH!!! hurlait toujours Malicia.
-Attends, attends... c'était quoi le sort déjà ? Euh.. AGUAMENTI! fit Lucrécya en tentant tant bien que mal de viser la bouche ouverte de son amie.
Elle la manqua plusieurs fois, éclaboussant au passage les étagères et parchemins de potions, mais parvint néanmoins à ajuster son tir et à verser une rasade d'eau glacée.
-Non mais c'est quoi ce raffut?! hurla une infirmière en entrant précipitamment dans la pièce.
Alors que de l'eau s'infiltraient entre les lits derrière elle, elle considéra la pharmacie avec des yeux horrifiés : la pièce était au bord de l'inondation. Au milieu d'une mare où flottaient des bouteilles brisées, des rouleaux de parchemins humides et autres ustensiles à présent inutilisable, se tenaient deux adolescentes avec de l'eau jusqu'aux mollets.
-Mais... qu'est ce que...
-C'était sympa cette visite, merci beaucoup chère madame, mais oh il est tard, il faut qu'on file, c'est pas tout ça! cria Lulu avant de tirer une Mali essoufflée hors de la pièce.
Elles quittèrent le dispensaire à toute vitesse.

Les deux jeunes filles filèrent directement dans la petite résidence d'en face, que Lulu et son mari louait le temps de leurs études.

C'était une maison pas très grande, mais assez coquette, déjà entièrement meublée. Lucrécya la découvrait pour la toute première fois.

-Mmh, pas mal, fit-elle, en regardant tout autour d'elle.

Elle ouvrit la porte qui menait à la chambre, et passa sa tête à travers.

-Mouais, ça peut aller.

Malicia, quant à elle, se laissa tomber sur le canapé, en face d'une cheminée éteinte.

-Ohmondieuohmondieuohmondieuohmondieuohmondieu j'ai pris des Amanites Distoïdes ohmondieuohmondieuohmondieu j'ai essayé de me déshabiller en public ohmondieuohmondieuohmondieuohmondieu j'ai dit à Gédane que je l'aimais alors que c'est pas vrai du tout ohmondieuohmondieuohmondieuohmondieu je vais aller tout droit en Enfer ohmondieuohmondieuohmondieuohmondieuohmondieuohmondieu !

-Attends, j'ai exactement ce qu'il te faut.

Lulu farfouilla dans ses bagages, que Marcus avait posé à côté de la table basse en verre, et en sortit un sac en papier kraft vide. Elle le tendit à Malicia, qui se mit à souffler dedans avec difficulté.

-Fomondieufomonfieufomonfieufomnfieu !

-Ca va mieux ? soupira son amie en s'asseyant à côté d'elle.

Mali baissa la tête :

-Pas vraiment.

-C'est cette histoire de Drago te tracasse, hein ?

-Moui.

Lulu hocha la tête. Elle ne savait pas quoi trop dire pour remonter le moral de son amie. Puis une idée fugace lui traversa l'esprit. Ca valait le coup d'essayer, mais… Mali le prendrait peut-être pas très bien…

-Oh… et… si je te disais que j'ai une solution pour aller mieux ?

Malicia grimaça, en se rappelant son expérience récente :

-C'est gentil, mais je veux plus de potions !

Elle avait eu l'impression horrible d'avaler un concentré d'un million de piments rouges en une seule gorgée.
Mais Lulu secoua la tête :

-Non, c'est moins violent qu'une potion, c'est pour… guérir ton esprit…

Elle lança à une Malicia intriguée un sourire on ne peut plus mystérieux...

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