Le cowboy battait le pavé depuis des heures déjà, juste devant la grande porte du QG des aristos, ruminant des menaces à demi-voilées à l’encontre du Doyen, Winchester, les clampins de cette bon dieu de fac en général, le Doyen de nouveau et ainsi de suite… Avant même le levé du jour, il s’était décidé à rejoindre sa fraternité qu’il avait depuis trop longtemps désertée. L’avis d’expulsion qu’il y avait lu accroché avait failli lui causé une triple rupture d’anévrisme, tant il avait été à ça de s’étrangler de colère. Lui qui avait voulu revoir tous ses potes Gammas et faire amende honorable auprès d’eux, auprès de sa bizut, Naëll, et… et merde. Il fallait toujours qu’il arrive un truc, ça il le savait, mais que ça arrive aux PIRES moments, ça, ça le débectait.

Il avait passé la dernière semaine des vacances à décuver gentiment dans sa piaule qu’il avait récurée à fond au prix d’un effort qui pour lui relevait du miracle. Tous les cadavres de bouteilles de bière avaient disparu et son lieu de vie avait retrouvé un semblant de propreté acceptable. Il s’était rasé, chose peu courante, avait passé deux jours supplémentaires dans sa baignoire, et aujourd’hui enfin, il se sentait, disons, comme une vieille merde de dragon. Mais ce sentiment lui était familier et avait atteint un niveau auquel il était accoutumé. Pour le coup il ne pouvait pas trop se plaindre, du moins jusqu’à ce qu’il se trouve une nouvelle raison de se mettre en pétard. Et là c’était trop pour lui.

Il avait donc été informé qu’il devait rejoindre ces gonzesses poudrées d’Alphas au plus vite, ce qui avait failli l’achever. Sur le coup, le ricain s’était dit qu’il passerait juste prendre quelques affaires à lui, en profiterait pour décoller la tronche de Winchester au passage avant de tailler la route. Mais voilà, ça faisait un moment qu’il trainait devant le Penthouse des AAA, et il n’arrivait toujours pas à se résoudre à entrer : c’était trop pour lui !

Non loin d’un petit muret de briques rouges attenant au QG des richards, il y avait son sac de cours et un tas de mégots haut comme la tour d’Azkaban, témoignant de sa mauvaise humeur qu’il n’avait pas réussi à calmer. Ses cours n’allaient reprendre que le lendemain, et il était tellement en rogne qu’il ne pourrait jamais se concentrer pour travailler. Un soupçon de nervosité naquit en lui, et il se passa nerveusement la langue sur ses lèvres sèches. Il avait soif, nom de dieu ! Il tuerait en cet instant pour un whisky pur feu, ou même une pauvre bierraubeurre ! Mais il était trop tôt… non c’était une mauvaise idée. Point barre.

Ses mains avaient commencé à trembler. Il extirpa une clope de son paquet de Huff and Puff quasi-vide et l’alluma du bout de baguette. Non ça n’allait pas. Soudain une voix éraillée le tira de ses pensées noires :

-Ah Machin !!! Bah c’est pas trop tôt !!!

Le yankee se tourna à ce moment-là, et esquissa aussitôt un pas en arrière pour repartir : Lucrécya Flynn était sortie en trombe du Penthouse à grands pas, sa minuscule silhouette contrebalancée par la taille démesurée de la batte de quidditch qui pendait à sa ceinture. De guerre lasse, il soupira et renonça à s’éclipser :

-Tiens donc, je me disais qu’il manquait quelque chose pour parachever cette matinée merdique. Tu me voulais quelque chose, ou tu t’es juste dit « tiens j’m’ennuie, j’vais emmerder Reynolds pour changer »?

Lucrécya se planta devant le yankee, et posa ses poings gantés de résilles noires sur ses hanches.
La mâchoire serrée, elle fronça ses sourcils et tira sa lèvre inférieure, visiblement furibonde. Toutes ces mimiques auraient pu paraître comiques, pour qui ne connaissait pas les colères légendaires de l'AAA et l'impulsivité sanglante de sa batte, qui pendouillait à sa ceinture cloutée.

-Ça fait des heures que je t'attends ! se plaignit-elle, de sa voix horriblement éraillée.

Il en fallait tout de même plus pour impressionner Reynolds, qui baissait vers elle des yeux mi-clos.

-Tu m'en diras tant.

-Chuis allé te chercher jusque dans la courge géante dans laquelle vous moisissez tous, vous autres, les saletés de hippies !

L'ex-Serpentard ne remarqua même pas la tronche que venait de tirer son interlocuteur devant l'insulte. Elle rajouta, en serrant ses petits poings :

-Et y'avait un avis du grand chapeauté qui disait que tu étais un Alpha Alpha Alpha, maintenant, comme moi !

Un silence éloquent retomba entre les deux étudiants. Titus se décida finalement à le briser.

-Et tu voulais célébrer cette bonne nouvelle avec moi autour d'un whisky pur feu ? ironisa le cowboy.

Il soupira :

-Ceci dit, j'aurais rien contre un whisky pur feu, là, de suite.

-T'es cinglé ou quoi ? J'en ai rien à carrer de ta fraternité ! persifla la brunette, en plissant ses yeux. Tu peux aller faire mumuse chez les Omegas si ça t'éclate, qu'est-ce que ça peut me foutre ?!

La patience de Titus commençait à s'épuiser :

-Alors qu'est-ce que tu me veux, bordel ?!

-Nan ! La vraie question, c'est : QU'EST-CE QUE TU FOUTAIS ? JE T'ATTENDAIS MOI ! A L'INTERIEUR !

Reynolds se pinça l'arrête du nez :

-J'ai pas assez de clopes pour te supporter jusqu'à la fin de cette conversation, alors VIENS EN AU FAIT, FLYNN !

Lulu pinça les lèvres. Elle contourna le cowboy, et le poussa dans le dos :

-Tu dois venir avec moi ! Allez, hop hop hop !

Le cowboy se retourna en un bond :

-Mais qu'est-ce que tu fous ?!

-J'ai un truc à te montrer !

-Et ça peut pas attendre ?

Il désigna la grande et belle bâtisse des Alpha Apha Alpha :

-J'ai des affaires à récupérer chez les péteux ! Et si au passage j'pouvais en foutre une à ce coyote de Winchester...

-Tu f'ras ça plus tard ! ordonna l'Alpha. En plus il est occupé, l'Archichou, il organise une visite champêtre avec les autres coincés du derche. Je lui en foutrai une de plus dans la tronche de ta part si tu veux. MAIS PLUS TARD !

Et elle poussa le Gamma en direction de l'Allée des Savoirs Interdits.


:arrow: Lucrécya et Titus vont LA !