Au fond du verre.



Elle était là, affalée, rincée et totalement amorphe sur le canapé défoncé de la citrouille géante. Les pieds sur la table basse, Isaac semblait totalement ailleurs. Elle avait passé la nuit à imaginer un plan pour faire s’évader ses parents d’Azkaban. Mais elle s’était rendue à l’évidence… Personne ne s’était échappé d’Azkaban, tout du moins, pas vivant. Elle devrait trouver un autre moyen. Peut-être devrait-elle enquêter pour découvrir l’enflure qui avait assassiné les types du Ministère pour faire accuser ses parents ? Quelqu’un sans doute qui avait quelque chose à cacher et dont Brona et Wyatt devaient avoir des soupçons. Isaac soupira, Allistair et elle n’avaient aucune chance de les faire sortir.

De plus, son frère était trop jeune à l’époque pour éventuellement se souvenir de quelque chose. En fait, elle se souvint d’une fois, elle devait avoir 10 ans, son grand-père les avait emmenés voir leurs parents. Isaac n’avait jamais eu peur du noir, et pourtant, ce jour là, elle avait paniqué. Ce fut la seule fois où Isaac pu voir ses parents. Les visages sombres, les traits tirés, les cheveux commençant à tirer vers le blanc et des physiques meurtris. Le couple O’Callaghan avait pourtant fait appel de nombreuses fois, mais sans succès. Ils devraient croupir ici à perpétuité.

Elle glissa sa main dans la poche et tira de là une photo de ses parents lorsqu’ils étaient en dernière année à Poudlard, c’était la fin de l’année et Brona était déjà enceinte, en sortant de Poudlard, ils se marièrent. Allistair ne tarderait pas à pointer le bout de son nez. Sur la photo, Wyatt enlaçait Brona qui tentait désespérément de réviser ses cours : la photo se termina sur un éclat de rire du jeune couple. Le bonheur rayonnait dans leur regard, cet enfant était le fruit de leur amour. Isaac quant à elle, elle était née dans la souffrance.

La jeune femme rangea la photo dans sa poche et compressa l’arrête de son nez entre ses doigts. Elle attrapa dans son autre poche une boite en métal rouillée – c’était celle de son grand-père – dont elle sortit quelques morceaux de fleurs qu’elle écrasa entre ses doigts. Elle en avait acheté un peu à sa collègue de bar aux cheveux verts en échange d’un peu de Poudracafard, parce que son truc ça faisait halluciner grave ! Isaac glissa la poudre dans une feuille fine puis roula l’ensemble qu’elle alluma immédiatement.

Elle tira une première fois : rapidement, elle eu mal au crâne. Puis une seconde fois, et cette fois-ci ce fut la bonne. Son angoisse s’estompa et elle se trouva apaisée. Elle sentait ses épaules s’enfoncer doucement dans le canapé et tout son corps se trouva plus léger. Bref, ça lui faisait un bien fou. Elle se tourna vers un groupe de camarade qui étaient en train de discuter tout en fumant quelque chose – dont on ne saurait deviner la provenance – mais surtout en train de boire. Isaac s’approcha et demanda simplement :

- Dites les gars, vous n’auriez pas une bouteille qui traîne par hasard ? – dit elle en secouant une fiole de sa mixture verte en face d’eux.

- Ah si tu nous tiens par les sentiments aussi…

Le type lui fila une bouteille entière d’un alcool bon marché tandis qu’il récupéra la Poudracafard. Ses potes ricanèrent d’avance : Isaac était parvenue à se faire une petite réputation grâce à sa drogue artisanale. Les étudiants de la Gamma Phi Orties se l’arrachaient parce qu’elle provoquait de violentes bouffées hallucinatoires et était facile à sniffer. De plus, la créatrice l’échangeait souvent pour pas grand chose. C’est qu’elle est généreuse notre Zazac !

Isaac retourna dans le canapé, et avala une large gorgée d’alcool fort. Son foie irlandais était fait pour résister à l’alcool depuis des générations, elle ne craignait plus rien ! Enfin presque…

Le plat à salade lévitait lentement. Penchant d'un côté, puis de l'autre, baissant dangereusement en altitude et manquant de tomber sur le lit en bois clair à moitié défoncé. La main qui tenait la baguette se voulait assurée, ne tremblant quasiment pas. Mais son propriétaire plissait les yeux à l'extrême, la mâchoire crispée. Titus déployait toute sa volonté pour maintenir son sortilège, mais bon sang qu'il se sentait rouillé.

Depuis son réveil abrupt dans les eaux troubles du fleuve, il ne se sentait plus aussi vif qu'avant. Et bien entendu, il avait fallu que ça tombe un mois avant les exams, alors qu'il se devait d'être à son top : hors de question qu'il passe une année de trop à repiquer dans cette fac de débiles !

Rien qu'à y penser il se remit en colère, et, déconcentré, laissa le plat retomber dans une cacophonie lamentable.

-Et MER-DE !!! rugit-il en lançant un violent sortilège qui envoya valdinguer la vaisselle récalcitrante à l'autre bout de sa piaule.

Il avait voulu se poser au QG des Gammas, histoire de faire un peu le point en pensant qu'il arriverait mieux à se concentrer. Peine perdue, fallait croire... Ça fait depuis quatre heure du mat' que je me concentre sur ces conneries, songea-t-il. Va falloir faire un break, là je suis plus bon à rien.

Résolu à lâcher son piteux entrainement, il se leva en grommelant et descendit dans le salon enfumé de sa fraternité. Rapidement, il jaugea l'ambiance : les canapés avachis aux coussins moelleux étaient presque tous occupés par ses petits camarades, de même que les tables, les poufs et même le minuscule espace de cuisine depuis lequel des rires vaseux se faisaient entendre. Les margoulins qui lui servaient de potes étaient sûrement déjà en train de préparer une quelconque jambalaya truquée et "améliorée", comme ils en avaient le secret.

Mais pour ça il était pas d'humeur. Il était jamais d'humeur pour rien de prime abord, sauf pour s'en coller une, même de bon matin. Surtout de bon matin. Et là visiblement, à quelques mètres de lui et perdue dans le foule de fleurs invétérés, il s'en trouvait une qui comme lui croyait plutôt aux vertus de la boisson avant midi. Se disant qu'un peu plus ou un peu moins de fumée ne changerait pas grand-chose à l'atmosphère ambiante, il s'alluma une cigarette, toussa brusquement avant de se racler la gorge et de s'avancer vers la squaw.

-Hey, s'annonça-t-il sans cérémonie en se laissant tomber sur la place à ses côtés.

Elle se tourna vers lui comme tirée d'une rêverie : il la reconnut vaguement, même si son nom lui échappait un peu. C'était une ancienne de la frat' qui se faisait généralement discrète, mais qu'il avait  croisé une ou deux fois au pub de McCormack, où elle bossait comme serveuse. Ca lui faisait bizarre, même après ces deux bon dieu d'années passées dans cette fac, il lui arrivait encore de croiser des têtes peu connues.

Il tendit la main vers la bouteille qu'elle tenait :

-Tu f'rais pas acte de générosité envers un camarade assoiffé et dans le besoin ?

Lentement, la drogue faisait effet et son bien être lui permettait de rêvasser un peu. Elle avait beaucoup travaillé ces derniers jours pour avoir son année, même si elle n’en doutait guère. Elle n’avait fait explosé la salle qu’une fois ce semestre, et partiellement en plus, pour une fois elle était fière d’elle ! Elle fut soudain sortie de sa rêverie par un gars de la fraternité qui s’installa à côté. Instinctivement, Isaac lui laissa un peu de place.

- Hey – répondit-elle sans vraiment de conviction
- Tu f’rais pas acte de générosité envers un camarade assoiffé et dans le besoin ?

Elle regarda la bouteille qu’elle venait à peine d’entamer, prit une bonne gorgée et tendit le récipient à son compère.

- Tiens, fais-toi plaisir, c’est moi qui régale aujourd’hui.

Elle avait déjà vu ce type quelque part mais impossible de se souvenir où exactement. Elle fouilla dans sa mémoire puis claqua soudainement des doigts : il venait parfois au pub ! Isaac avait sans tout aussi du le croiser dans la fraternité.

- C’est la première fois que je te vois. Enfin première… Je veux dire, vraiment.

Il la regarda un peu bizarrement puis acquiesça.

- Pas faux. Pareil pour ma poire. Je crois que c’était au…

Son attention fut détournée par les étudiants de tout à l’heure qui avaient échangé l’alcool contre la drogue verte. Ils pouffaient de rire et semblaient totalement ailleurs. L’un sautilla sur le pouf en s’accrochant presque aux murs, à priori quelque chose traînait au sol et ne semblait pas plaisant… Isaac pouffa de rire, sa Poudracafard fonctionnait à merveille !

- Pub. – réplique Isaac. C’était au pub exact ! Et puis quelques fois ici aussi.
- OUAI C’EST ÇA ! – s’écria le jeune homme.

Ils furent dérangés dans leur conversation par un des étudiants junkies un peu plus allumé que les autres. Il tourna légèrement autour d’eux puis s’approcha d’Isaac en se tortillant les doigts.

- Euh… Isaac… Hey ahah.. T’aurais pas encore un peu de ton machin là… ? J’aimerais bien faire une petite blague à un gars d’une autre fratrie ahah
- Nan, même pas en rêve.
- Alleeeer s’il te plait !
- Nan dégage !

Le bolosse dégaina sa baguette et la pointa avec.

- M’oblige pas à me servir de ça.
- Tu m’casses la tête là !!

Isaac se leva, l’attrapa par le col et lui flanqua son poing dans la tronche. Avec elle, c’était toujours radical, c’est oui, non, ou son poing dans ta gueule. Pourtant ce mec le savait hein !! Ce dernier se releva, cracha sa dent de devant et décampa sans demander son reste. L’irlandaise se réinstalla dans le canapé en se laissant tomber, puis, tête en arrière sur l’assise, elle se tourna en direction du jeune homme tout en lui tendant la main :

- Au fait, je m’appelle Isaac. Isaac O’Callaghan.

Titus regarda au loin le pauvre gus qui titubait aussi vite que possible loin de la furie qui venait de l’emplâtrer, et tendit à cette dernière une main percluse de crampes :

-Titus Reynolds.

Elle la lui serra avec une poigne qu'il n'aurait pas soupçonnée, et le yankee grimaça de douleur.

-Ben qu'est-ce que t'as ? T'as l'air tendu ?

-Non t'inquiète.. dit-il en serrant les dents. Tout baigne..

Pour oublier la meurtrissure de ses cuticules, il empoigna la bouteille d'Isaac et s'en servit une nouvelle lampée. La Gamma la lui arracha des mains sans management lui infligeant au passage une nouvelle pointe de douleur :

-Ouais bon, faut pas abuser non plus ça s'appelle reviens !

Le cowboy se massa la paume et leva les sourcils devant la hargne de sa camarade de frat' :

-Hey ! Et le partage, la camaraderie toutes les valeurs que les Gammas arrêtent pas de prêcher, ça te passe au-dessus de la tête ?!

Isaac détourna la tête avant de porter le goulot à ses lèvres :

-Si si pour tout ce que tu veux. Sauf ma gnôle.

Une veine palpita à la tempe du ricain qui commençait à s'énerver... avant qu'un sourire carnassier n'étire ses lèvres. Ok, je suis peut-être pas au meilleur de ma forme pour ce qui est de la magie, songea-t-il. Mais à ce petit jeu, y a pas grand monde qui peut me tenir le menton. Il se dit que que la compagnie de cette fille, loin d'être désagréable, allait lui promettre de bonnes tranches de rigolade. Et une nouvelle migraine carabinée pour le lendemain.

Il fit apparaitre deux verres à shooter sur la table basse devant eux d'un coup de baguette. Intriguée, Isaac stoppa sa lampée, et la bouteille toujours eux lèvres jeta un œil aux godets qui venaient d'apparaitre. Elle avala sa goulée et reposa bruyamment son litre avant de se tourner vers Titus :

- Ça veut dire quoi ça ?

-Ça ma grande, ça veut dire que si tu veux garder le jaja pour toi toute seule, encore faut-il prouver que tu peux l'écluser mieux que tes petits camarades.

Sans attendre sa réponse, ils e leva et se tourna vers le reste de la fraternité :

-HÉ LES GARS !! VOUS EN AVIEZ RÊVE, VOUS L'AVEZ RÉCLAMÉ A QUI VOULAIT L'ENTENDRE, N'EN J'TEZ PLUS EN VOICI UN !! UN NOUVEAU DUEL AU SOMMET POUR SAVOIR QUI S'EN TIRE MIEUX A LA PICOLE !!

Alors que la foule avinée et complètement stone de leurs camarades de fraternité se réveillait enfin et poussaient des cris de joie ponctués de rires vaseux, Titus se tourna en souriant vers la Gamma qui le regardait en haussant un sourcil.

-Alors, cette fois-ci tu me la passes cette bon dieu de gnôle ?

Titus ouvrit la bouche, avant d'hésiter un instant. Il avait pas vraiment pensé à ça : d'habitude quand on se lançait des défis au sein de la fraternité Gamma, c'était pour la beauté du geste et une bonne tranche de rigolade. Mais là, cette Isaac proposait carrément de corser les choses. Et en bon pilier de saloon, le ricain ne refusait jamais une relance dans un poker.

Il hocha la tête, enthousiasmé :

-C'est pas faux, un pari c'est beaucoup plus fendard. Voilà ce que je te propose..

Il se mit à faire les cent pas autour de sa camarade tout en déclarant solennellement :

-Si tu me bats à ce petit jeu, je veux bien t'être redevable.

-Redevable... de quoi exactement ?

-De ce que tu veux, ma grande. Si t'as un souci ou que t'as besoin d'un garçon de course, tu sauras où me trouver.

-Et si par miracle tu arrives à me battre ?

Titus cessa de marcher et se planta devant elle :

-Ben la réciproque. Si tu perds, c'est toi qui me devras un service. Et crois-moi sur parole, si c'est le cas tu vas vivre dangereusement.

Devant l'attitude du yankee, la Gamma croisa les bras avec un air de défi :

-Oh la vache.. j'suis morte de trouille d'un coup.

-Comme de juste. On commence ?

Il se tourna vers le reste de l'assistance :

-EST-CE QUE VOUS ÊTES PRÊTS ?

Devant la réaction enjouée des autres Gamma Phie Orties (enjoué était ce qu'ils pouvait faire de moins mou..), qui poussèrent de nouveaux cris d'encouragement, Titus se tourna vers sa challenger, avec dans les yeux une lueur de défi. Il devait admettre, cette fille commençait à lui plaire, elle ne s'embarrassait de rien, sans être pour autant d'humeur assassine, et elle n'avait pas froid aux yeux.

Quand il était vautré sur son lit de guingois dans sa piaule de fortune, à répéter les même sempiternels exercices de magie, à littéralement mourir d'ennui, il avait été loin d'imaginer qu'il s'amuserait autant pas même une heure plus tard. Il était pas vraiment d'humeur à se vautrer dans un canapé à consommer des substances qui faisaient rire comme un gland. Ni à passer sa journée enfermé, à réviser ses putains de sortilèges, histoire de voir s'il lui restait encore quelque chose dans le cigare.

Ça par contre, c'était du programme qui promettait.

Alors qu'Isaac soutenait son regard, il saisit la bouteille qu'elle avait posée, et remplit les godets à ras-bord, puis il s'assit face à elle, l'invitant à faire pareil, et levant bien haut son verre :

-Alors, partante ?

Le membre 'Isaac O'Callaghan' a effectué l'action suivante : Lancer de dés

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'CARTE CHANCE' :

Résultat : 1

-J'ten fou.. foutrait du mignon, moi, grogna-t-il, désarçonné par la remarque en s'enfilant un nouveau verre.

Il tangua imperceptiblement.

Ok, là d'accord. Il aurait effectivement peut-être pas du s'enfiler une douzaine de godets la veille au soir pour fêter... ben que dale en fait. Du coup, rien qu'avec le fait qu'il attaque aussi sec de bon matin, ça tanguait déjà sur le pont du navire.
Mais bon, il n'était plus à ça près. Même si a tête lui tournait déjà, il allait pas s'arrêter en si bon chemin, surtout avant même de s'être mis en chemin.

-Bah alors ? se moqua Isaac comme pour faire echo à ce qu'il pensait. On vient à peine de commencer l'apéro et t'es déjà beurré ? Tu vas pas tenir logtemps à ce rythme !

-Cau..cause toujours ma grande. J'ai commence la fiesta en avance hier soir, j'ai juste besoin de me remettre en selle..

-Pas mon problem fit-elle en haussant les épaules un sourire de victoire s'étirant déjà sur ses lèvres. Fallait y penser avant.

Mouais... songea-t-il. Le voilà le souci : en ce moment il avait pas trop tendance à réfléchir avant de faire une connerie. Il pouvait mentalement rajouter ça sur sa liste de choses à améliorer, juste après "éviter de fumer une plantation entire de tabac de Virginie en deux jours", et "trouver le moyen d'arrêter de ressembler à un sans-abri". Après avoir s'être enfilé un nouveau verre derrière la cravate, il secoua la tête et lança un regard appuyé à sa challenger du jour.

Y avait quelque chose de sacrément déluré et décomplexé chez cette fille, un truc qui lui rappelait le temps où il se prenait tellement moins la tête avec toutes les merdes qui pouvaient lui tomber sur le coin du bonnet. Un temps pas si lointain où il se contentait de résoudre ses soucis persos l'un après l'autre, comme ça venait sans s'en inventer d'autres et ruminer non stop. Comme si avoir le pire caractère du monde ne suffisait pas.

Nope, cette fille n'avait pas l'air comme ça de ruminer quoi que ce soit. Peut-être qu'il pouvait y arriver lui aussi, comme au bon temps, juste pour quelques heures.

Juste rigoler et picoler dans le joie et la bonne humeur. Il fixa de nouveau la Gamma et fronça les sourcils. Non, il avait beau chercher, y avait pas beaucoup de squaws qui l'avaient trouvé mignon dans son existence. Et encore moins dans l'état où il se trouvait. A part sa mère peut-être. Et même là il était pas sûr de son coup à 100%.

Il se versa une nouvelle rasade d'alcool, et une autre à sa camarade. Il allait pas abandonner en si bon chemin.

Isaac avala son verre sans tanguer. Enfin, elle était assise aussi. Faut dire que debout, elle ne ferait peut-être pas autant la maline.

- Tu vas pe…perdre ! Foi d’irlandaise mon pou… mon poulet !

Soudain, elle rota. Mais un rôt à faire pousser des cheveux à un chauve ou à faire décaniller la plus brute des brutes.

- Oooooooh il était ju…juste énooooorme ! – s’exclama t-elle
- WOH LA VA..VACHE ! – enquilla Titus

Malgré l’alcool qui lui montait à la tête, elle vit une ombre à sa gauche et une main se glisser sur son sac posé au sol. Elle se leva d’un bond et chopa le mec par le col.

- KESTU…TU VEUX BOU…BOU…BOUFFON ?
- Ben… récupérer mon sac..

En fait, le sac au sol, n’était pas celui d’Isaac mais celui du type qui voulait juste prendre ses affaires avant d’aller en cours. La junkie était venue sans son sac, ayant tout dans ses poches… Mais bourrée comme un groin, forcément, ça ne s’alignait pas très bien dans son cerveau.

- C’est l’m.. l’mien ! – hurla t-elle.
- Mais n…

Le type n’eut pas le temps de répondre qu’elle lui colla son poing sur le pif. Manque de peau pour l’irlandaise, le type était pas du genre à s’laisser faire et elle reçu un marron sur le coin de la tronche en retour. Titus se leva tout aussi difficilement et s’interposa entre les deux clampins, tenant de les calmer.

- Hé ! Faut pas s’é.. s’énerver ! – fit Titus.

Ben pas de bol pour lui non plus, le type était un peu vénère et il lui colla une patate dans les mandibules. Et là, Isaac ne se rendit pas compte de ce qu’elle venait de créer. Une bagarre générale au sein de la citrouille géante. Tandis que le type fut attrapé par un autre Gamma, Isaac attrapa Titus par le col et le tira vers le sol, s’abritant par la même des jets de bouteilles et de verres. Elle le regarda dans les yeux et avala un nouveau verre, tandis que son œil droit commençait à prendre une autre couleur.

- C’est à ton tou… tour maintenant !
- Compte sur moi ! – ricana t-il.

Isaac lui servit alors un nouveau godet, attendant que le Gamma se l’enfile, comme les autres.

Au sein de la citrouille s’était installé une joyeuse bagarre, et à priori cela semblait habituel puisque des élèves venant d’autres confréries entraient et sortaient pour récupérer livres/alcool/substances illicites en s’abaissant pour éviter de se prendre des branlées, mais sans vraiment être tellement surpris de la situation.

- On va bien s’marrer ! – fit-elle.

C’était la première fois qu’elle s’amusait autant depuis la bagarre avec Lulu, et Titus semblait apprécier. D’une certaine manière, elle était ravie.

TAUX D'ALCOOLEMIE :
TITUS : 10/20 HP
ISAAC : 17/20 HP

On voyait pas ça tous les jours. Des Gammas en train de se foutre joyeusement sur la gueule après quelques vannes mal placées et un léger malentendu à base de picole non-partagée... Il en fallait d'ordinaire beaucoup, beaucoup plus à ses camarades de frat' pour partir en vrille.

Mais bon, tout changement était bon à prendre par les temps qui courent, et Titus s'enfila un nouveau godet... avant de manquer s'effondrer sur une table basse. Un des étudiants sorciers coiffé d'un bob informe d'où dépassaient des dreads d'un blond crasseux se mit à hurler en se jetant au milieu de la cohue :

-MERDE MAIS C'EST QUOI CA ?!! C'EST L'APOCALYPSE LES GARS !!! LES MAGES NOIRS DEBARQUENT, PLANQUEZ-VOUS ILS VONT CONTRE-ATTAQUER !!!

Il y eut un léger moment de flottement alors qu'il se jetait en une cascade maladroite derrière un sofa défoncé, avant de faire pleuvoir sur l'assemblée de Gammas une bordée de sortilèges, bien planqué derrière son abri de fortune. Le chaos reprit de plus belle et les maléfices fusèrent à un rythme effréné.

Le ricain était extatique.

-C'est bien les gars !! Bravo ! J'savais bien qu'un jour vous alliez vous réveiller !

Pour toute réponse, un sort d'uppercut le frôla avant d'heurter la tête d'un de ses camarades barbu qui se tenait derrière lui. Alors que le babacool s'envolait, la mâchoire en miettes, Titus se planqua aux côtés d'Isaac qui n'avait pas demandé son reste. Elle avait retourné une table et par un trou qui la perforait suite à un sort maladroit, elle faisait passer sa baguette pour allumer tout ceux qui passaient trop près d'elle.

Il s'accroupit à ses côtés, la bouteille de tord-boyaux à la main et tendit un verre plein à la Gamma, avec un large sourire :

-T'éparpille pas ma grande, on a- on a pas en-encore fini !

-Tu vois pas qu'j'suis occupée, là ?

Le yankee haussa les épaules en soupirant :

-Oh ben moi pour ce que j'en dis.. Si.. si t'as décidé d- d'jeter l'éponge..

Isaac lui lança un regard mi-amusé mi-outré.

-Tu te fous de moi ? T'oses me dire ça alors que clairement t'arrives même plus à articuler deux phrases ?

Un sort d'explosion emporta la moitié de la table et ils se retrouvèrent planqués derrière un misérable morceau de bois noirci. Titus se releva pour faire face à leurs assaillants, les mains en signe d'apaisement :

-Ok bon les gars, là faut pas abuser non p-

Un maléfice cuisant lui frappa l'épaule, et la bonne humeur du cowboy vola en éclats :

-BON VOUS ALLEZ ARRETER DE M'RAPER LES RAISINS, TROUS DU CUL ?!

Joignant le geste à la parole il dégaina sa baguette et stupéfia trois de ses camarades qui désormais firent un léger détour avant de tomber dans son périmètre. Toujours furax, il se tourna vers Isaac :

-BON TOI, TU LA DESCENDS TON AUGE OU J'TE FAIS UN CROQUIS POUR T'EXPLIQUER COMMENT FAIRE ?!

TAUX D’ALCOOLEMIE :
TITUS : 10/20 HP
ISAAC : 14/20 HP


Elle attrapa Titus par le col et le força à la regarder boire son verre cul sec, les yeux dans les yeux. Elle s’essuya la bouche d’un revers de la manche avant de balancer un sort explosif à un type qui les pointaient dangereusement de sa baguette.

- UN TRUC A DI…DIRE L’MOU DU SLIP ? grogna t-elle en lui fichant le verre entre les mains.

- TU VAS PERDRE !!!

Une gerbe scintillante frôla son cou et elle senti quelque chose tomber sur son épaule. L’irlandaise passa sa main et récupéra le truc qui était tombé. Son visage devint alors rouge de colère et émit un hurlement diabolique à secouer les entrailles de la Terre en brandissant une mèche de cheveux noirs : le bougre qui lui avait lancé un sort avait réussi à lui couper les cheveux d’un côté.

- J’VAIS M’LE FAIRE ! VIENS LA TÊTE DE GL…GL…GLAND !! hurla t-elle en se jetant d’un bond sur le type.

Elle lui foutu dans un premier temps un doigt dans chaque narine avant de lui glisser un coup de genou là où ça faisait mal. De loin, Titus grimaça de douleur, il compatissait avec son camarade.  Le pauvre homme se roula au sol, se tortillant sur place. Alors qu’Isaac allait en remettre une couche, elle fut tirée en arrière par le col et manqua de justesse une explosion. Titus venait de lui éviter quelques… ennuis.

- Fais g…gaffe !

- AH ! J’t’en dois une ! fit-elle.

La salle s’était transformée en véritable champ de bataille, et tout ça par sa faute. Elle ne savait pas si elle devait être contente ou honteuse. Sans doute un mélange des deux. Elle attrapa à son tour la bouteille et tenta de verser une première rasade, sans succès. Tout le liquide se répandit au sol. La deuxième fut cette fois la bonne. Planqués derrière le sofa, et après avoir dégagé le dreadeux, Isaac tendit le godet à Titus.

- Hé ! Tu s’rais pas américain toi ??

- Bah si ! Co..Comment tu sais ?

- Ton accent ! Un vrai pécore de Western ! J’aime bien héhé – ricanna t-elle.

- Ouai bah tu peux p..parler toi hein avec ton sale acc…accent d’irlandaise là !

- OUAIP, ET FIERE ! – fit-elle en portant sa main à la poitrine, mimant un air faussement solennel.

Miraculeusement, une bouteille de bière avait réchappé au massacre et roula à côté d’eux. Isaac l’attrapa, la décapsula à l’aide de son briquet et en bu un tiers. Pour les irlandais, la bière c’était comme de l’eau, ça faisait rarement du tort à leur foie surentraîné.
Soudainement, une accalmie se fit ressentir. Et au bout d’un moment, un silence ponctué de gémissements et de légers rires nerveux de types totalement défoncés s'installa. Isaac se releva lentement et fit dépasser le haut de sa tête de l’arrière du sofa pour juger de la scène. Apocalyptique. Elle se leva, titubant. Elle en eu la chique coupée. Des étudiants s’amoncelaient à droite et à gauche, certains totalement sonnés, d’autres, beurrés comme des groins.

- Woooooow c’est de loin l’une des meilleures batailles de ma vie ! s’exclama t-elle fière.

Elle posa ses mains sur les hanches en loupant la hanche droite dans un premier temps, puis se tournant vers Titus :

- On a fait du beau boulot !!

TAUX D'ALCOOLEMIE :
TITUS : 6/20 HP
ISAAC : 14/20 HP

Titus la considéra quelques instants, en clignant lentement des yeux, tanguant légèrement sur place. Il fixa un instant la binouze que l'irlandaise tenait du bout des doigts de sa main droite et la lui prit sans dire un mot.

Il en avala les deux tiers restants avant de l'envoyer se briser contre une poutre en bois, puis il s'avança vers Isaac et, la pointant d'un doigt réprimandeur, il parvint à articuler :

-On a COMMENCE le bou-bou... boulot. Nu..ance.

Il voulut tendre le reste de la bière à son adversaire avant de réaliser ce qu'il venait de faire.

-Merde.. a' plus..

Il réfléchit longuement, ouvrant un œil trop grand, plissant l'autre à l'extrême.

-Heuu, ça va ? fit la Gamma en agitant une main devant son visage. T'es toujours des notres ?

Titus ferma un peu plus les yeux et fit taire sa challenger en levant l'index :

-SsssShh... J'réf...réfléchis..

Elle haussa un sourcil, visiblement circonspecte.

-Réfléchir ? Mais t'es plus qu'une épave beurrée ! Réfléchir à quoi au juste ?

Le cowboy mit longtemps à répondre, et pas avant qu'Isaac ne lui mette un taquet sur le sommet du crâne pour le réveiller un peu.

-J'réfléchis à la s-s-su-... ah m-merde ! A la suite du.. du programme !

La sorcière regarda autour d'elle l'entassement de leurs Gamma Phie Ortie, inconscients et assommés par la baston, avant de reporter son attention sur le ricain :

-Ouais ben si tu veux mon avis, on a perdu not' public..

Titus fit un geste agacé de la main, l’œil toujours mi-clos :

-Rien à fout' de ça ! C'est pas pour leurs beaux yeux -qu'sont même pas beaux d'ailleurs chais pas pour-pourquoi j'dis ça moi- BREF.. c'pas po-pour eux que j'me... j'me meule la tronche !

Il se rapprocha de son adversaire et planta son regard dans le sien :

-C'POUR ME SENTIR V- v...

-Viril ? hasarda la gAMMA.

-VIVANT !!! s'écria Titus soudain fier d'avoir réussi à articuler un mot sans bredouiller.

Elle l'observa un instant, le visage impénétrable. Il n'aurait pas su dire ce qu'elle pensait de tout ça, vu que d'une il était bourré, et que deux il avait jamais été un foutu légilimens de toutes façons.

-Ok... finit-elle par dire, pensive. Et tu suggères quoi dans ce cas ?

Sans la lâcher des yeux, il brandit sa baguette vers sa droite et articula sans se tromper :

-Accio flacon de gnôle piqué à pépé !

Il y eut un bruit de bois qui craque, puis celui d'une porte qu'on claquait à la volée, suivi d'un bruit de vitre fracassé. Puis plus rien. Jusqu'au sifflement montant crescendo d'un objet volant à toutes vitesse. Quelque chose fusa à travers le salon du Grand Potiron et Titus le saisit au vol : c'était la bouteille de verre sale renfermant l'Eau-Qui-Brûle-Fort-Mais-Pas-Longtemps. La liqueur pas très fine que Malcolm Reynolds, son aïeul décrépi et saoul comme une mule avait fabriqué à l'aide de sortilèges, et de poudres indiennes à la provenance inconnue.

C'était à l'en croire le pire tord-boyaux de ce côté de l'hémisphère, et il se murmurait dans les saloons de son patelin que le palais de celui ou celle qui en buvait pouvait fondre à la première goulée.

Sans dire un mot il en versa deux godets et en tendit un à Isaac.

-Ça, c'est un concentré des flammes de l'enfer ma grande. Un incendio fait breuvage. Tu te sens à la hauteur pour le grand final ?

TAUX D’ALCOOLÉMIE :

TITUS : -3/20
ISAAC : 3/20

Le yankee ne se le fie pas prier et à peine la Gamma eut-elle extirpé son paquet de sa poche qu'il cracha son mégot sans ménagement, et arracha la précieuse cibiche des mains d'Isaac.

Il prit une allumette à moitié consumée des doigts d'un de ses frangins de fraternité écroulé inerte au sol, et s'en servit pour littéralement foutre le feu à sa clope. Manquant de se brûler au troisième degré, il secoua sa paluche endolorie et aspira la moitié de sa sèche, dont les cendres saupoudrèrent les lattes brutes du plancher.

Il entama un mouvement prudent consistant à se laisser tomber dans un sofa défoncé, mais se ravisa au dernier moment et, voulant garder le peu de dignité qui lui restait, préféra rester debout. Il en résulta une perte d'équilibre qui faillit le faire tomber comme une bouse de dragon dans une tourbière, et il dut battre des bras pour maintenir sa position initiale.

Durant tout ce temps, sa challenger n'avait cessé de se marrer, se foutant ouvertement de sa tronche. Avant que le cowboy ne réalise qu'elle était beaucoup trop stone pour ça, et ne faisait que ricaner toute seule.

Il expira un épais nuage de fumée, et reporta son attention sur le godet qui se trouvait devant lui, posé sur la table basse. Bon dieu, songea-t-il, ce truc-là ça plaisante vraiment pas en fait..

Il le porta à hauteur de regard et l'examina avec autant d'attention que son état d'ébriété avancée le lui permettait :

-Ouaip, moi qui croyais qu'ça allait pas valoir un clou, comme toutes les pu..put..ain de décoctions d'cactus qu'le v-vieux avait distillées dans l'temps...

Le rire de la fille qui l'accompagnait redoubla, et sur le coup il aurait pas su dire si ce qu'il venait de dégoiser était vraiment hilarant, ou si ça avait juste un rapport avec le fait qu'elle était en train de reluquer sa main sous toutes les coutures, et trouva ça ben... hilarant.

Le pressentiment que la murge improvisée qu'ils venaient de se coller arrivait à son dénouement apparut comme une évidence au ricain, et celui-ci leva bien haut son godet comme un ultime baroud d'honneur :

-Salud.

Et il laissa couler l'intégralité de ce concentré de lave en fusion dans son gosier. Et il devait le dire, il se sentait remarquablement bien, il pétait la forme même ! Isaac, devant ce spectable, sortit de son trip et se dressa sur les coudes pour l'observer, intriguée :

-Ben mon salaud.. T'as même pas des fourmis dans les jambes ? Ni perdu le contrôle de ta vessie ?

-Et boh non, faut croire, fit le cowboy avec prudence, ahuri par ce pronostic plus clément qu'il ne l'aurait cru.

Ragaillardi par ce shot cul sec gouleyant, il retrouva un sourire béat et se pencha vers la Gamma :

-Match nul ! Allez pour feter tout ça j't'offre un verre !

Elle mit une seconde à comprendre, puis explosa de rire et se leva tant bien que mal.

-Ouais allez chuis pour !

-Parfait ! Du coup on- oh chiottes.

Isaac s'arrêta net alors qu'elle ramassait péniblement ses affaires :

-Ben quoi ?

-J'crois que ça vient finalement.

-Qu'est-ce qui vient finalement ? Tu...

Et Titus s'écroula de tout son long sur la table basse qui avait été témoin de leurs excès, la brisant net en deux dans sa chute. Il venait de basculer dans un autre monde, divaguant au pays des poivrots.

- Eh merde…

Titus venait de s’écrouler sur la table, la brisant en deux au passage. Elle se releva, et s’étira, retenant un haut le cœur. Il divaguait totalement, franchement dans un autre monde. Et quant à Isaac, elle n’en était pas loin non plus. L’irlandaise ramassa ses affaires, difficilement, et releva péniblement l’américain, passa un bras par dessus ses épaules. Dans un effort, elle le souleva et se fraya un passage à travers les débris de bouteille et les épaves servant de Gamma, laissant les pieds de Titus traîner au sol.

- J’ai gagné mon pote ahahahah

- Mmmglrglgr……. – marmonna t-il.

Isaac sortit de la citrouille géante leur servant de QG et continua lamentablement à tirer Titus avec elle.

- J’vais pas t’laisser là-dedans quand même…

Soudain, elle l’entendit ronfler, la bouche grande ouverte, laissant un filet de bave s’échapper. Isaac leva les yeux au ciel, glissant un sourire en coin, puis elle continua à avancer dans la rue avant d’arriver au pied de son appartement miteux. En ouvrant la porte du bâtiment, elle lâcha Titus qui tomba au sol et qui se mit à sourire comme un benêt dans son sommeil.

- Ah bordel. J’avais oublié que j’étais pas au rez-de-chaussée moi… - souffla t-elle.

Elle souffla nerveusement, et attrapa les bras de Titus, le tirant cette-fois en arrière, laissant son dos et ses fesses taper contre les marches de l’escalier tandis que l’irlandais les montait à reculon. Elle grogna en s’étirant le dos en arrivant sur le minuscule palier de son appartement. Elle ouvrit péniblement la porte, s’y reprenant à trois reprises, et tira à nouveau le junkie dans sa chambre, et le hissa sur son lit. Après y avoir jeté l’américain, elle glissa un seau à côté. D’ailleurs, on pouvait y voir écrit en caractère gras : MERCI DE BIEN VISER. On imaginait le seau témoin de nombreuses galettes ratées.

Alors que la Gamma allait s’affaler dans la chaise de son bureau, elle fila dans sa salle de bain et offrit une œuvre d’art digne des plus grands artistes contemporains à ce qui lui servait de chiottes. Puis elle alla s’affaler dans le siège de son bureau, s’endormant instantanément. Ronflant au passage.




Le lendemain, elle se réveilla, un mal de crâne à se taper la tête contre un mur, une haleine à faire pousser les cheveux d’un chauve et un teint blafard. Bref, elle avait encore pris une cuite. Tandis qu’elle se dirigea dans la cuisine pour se faire un thé à base de plantes médicinales, elle entendit un râle suivi d’un bruit guttural. Titus venait de se réveiller et renvoya tout son repas de la veille dans le seau sans en mettre à côté. Isaac passa la tête dans l’encadrement de la porte et ricana.

- Bien visé mon grand !

- Mmmh….. qu’est-ce que j’fous là moi ??

- Ben, t’as pris une sacrée cuite la veille et je ne voulais pas te laisser moisir avec la frat, donc je t’ai ramené chez moi et t’as pieuté dans mon lit.

- Mais t’as dormi où toi ?

- Dans mon fauteuil – fit-elle en pointant le fauteuil du doigt. Une couverture mauve y trônait. – Tu veux du café ? Du thé ?

- Nan ça va merci. J’crois que je vais rentrer chez moi.

- Comme tu veux.

Titus se leva difficilement, s’installa au bord du lit et se frotta le crâne, qui devait être au moins aussi douloureux que celui de l’irlandaise.

- Hé au fait, j’ai gagné. – dit-elle triomphalement.

- Ah ouai c’est vrai… J’t’en dois une alors !

- Ouaip ! Enfin, si tu pouvais déjà commencer par nettoyer le seau, je ne dirais pas non…

Titus acquiesça, attrapa le seau et tenta de le nettoyer dans la salle de bain en évitant de renvoyer une nouvelle galette. Une fois propre, il retourna dans la chambre/salon/salle à manger/bordel, et fit signe à l’irlandaise.

- Bon, j’me taille. C’était cool ! Tu me diras ce que tu voudras en échange.

- Ça roule. Tombe pas dans les escaliers en partant hein !

- Tu m’prends pour qui ?

- Ben pour un mec qui vient de prendre une cuite légendaire…

L’américain ricana, attrapa sa veste et quitta l’appartement. En tendant l’oreille, Isaac entendit un fracas dans les escaliers en bois, un râle et à nouveau le bruit de pas dans les escaliers. Titus s’était cassé la gueule. Comme elle l’avait dit… Elle s’adossa au mur de la cuisine et regarda son appartement miteux. Il n’était pas si mal. Mais était miteux quand même. Elle ouvrit les fenêtres afin d’aérer le plus possible et d’essayer d’éliminer l’odeur de vomi qui avait empli l’appartement. Elle alluma un bâton d’encens puis s’alluma une cigarette. Ce type était vachement cool.

Mais comme à son habitude, son « problème » revenait toujours quand elle revenait à son état de solitude, après avoir passé un bon moment. Elle sentit son estomac se nouer. Elle attrapa sa boîte à pilules et en avala une avec un verre d’eau. La junkie était parvenue à voler deux boîtes dans une pharmacie moldue en employant la magie, chose qui était pourtant interdite mais qu’elle faisait régulièrement. L’apaisement revenait enfin. Son regard se dirigea vers le godet.

Elle était vraiment au fond du verre.