Lucrécya entra comme une furie dans la petite maison qui lui tenait lieu d'habitation pour la durée de ses études.

-MAAARCUS JE SUIS RENTRÉE !!!

Un long silence lui répondit.

-Marcus ?!

Lulu fronça les sourcils : devant elle, un bordel incommensurable la surplombait. Par terre, s’étendaient des tonnes et des tonnes de vêtements couverts de diverses tâches diverses, des canettes de bière broyées, des flacons de potions à moitié plein qui se déversaient sur la moquette... Les jouets de Rufus et des parchemins recouverts de leçons de cours se mêlaient à des assiettes aux contenus pourrissant. La jeune fille fit un pas en avant, et brisa sous ses bottes crasseuses une bouteille bien entamée de whisky pur feu.

Elle soupira : c'était du Marcus tout craché. Il avait énormément de qualité, c'était un mari génial et un père hors pair, mais dès qu'il s'agissait d'hygiène et de rangement, il ne fallait pas trop compter sur lui.

Lulu mit instinctivement sa main dans sa poche à la recherche de sa baguette histoire de jeter un sortilège de rangement, en vain, évidemment.

-Pfff, faut pas que j'oublie d'aller la récupérer chez ces crétins d'Alpha...

Elle se rappela soudain qu'elle était à présent l'une de ces crétins, et se morigéna intérieurement.

Elle entra dans la chambre, aussi désordonnée que le salon, et s'assit sur le lit qui n'avait pas du être fait une seule fois en deux longues semaines.

Bon. Marcus devait être en cours, ou en train de la chercher quelque part dehors. Le berceau de son fils, devant elle, était vide, donc Rufus était sûrement avec lui.

Lucrécya sentit des larmes lui monter aux yeux. Ils lui manquaient tellement ! Mais bon, ce n'était qu'une question de temps avant qu'ils rentrent, à présent !

Elle se releva, et agrippa Séraphine, qui était restée là où elle l'avait posé pour la toute dernière fois, sur sa commode. Puis, elle aperçut, juste à côté, son miroir à double face.

-Mali ! s'exclama-t-elle soudain.

C'était en compagnie de Malicia qu'elle avait acheté ce miroir ! Elles avaient acheté le même, dans une petite boutique fashion de Pré-Au-Lard, histoire de ne jamais se perdre de vue, même après Poudlard !

Sa meilleure amie elle aussi lui manquait tant ! Durant son horrible séjour en Transylvanie, elle avait souvent souhaitée être coincée avec elle, et non pas avec cet abruti de blondinette de Lestrange.

D'une main tremblante, elle mit son miroir devant son visage, et put se rendre compte qu'elle avait vraiment mauvaise mine. Ses joues étaient creuses, sales et couvertes de fines cicatrices. Quant à ses yeux si cernés qu'ils en étaient enfoncés dans leurs orbites, elle ne préférait pas y penser.

Elle ferma les yeux, et récita :
-Malicia McGuire !

L'image du petit miroir de poche de brouilla, et la tête familière de Mali apparut. Sauf qu'étrangement, ses cheveux s'étaient encore plus assombris.

-M... Mali ? balbutia Lulu, prise d'un coup par l'émotion.

-Lustucru ?!

Puis la communication se coupa net.

A peine la communication se fut-elle arrêtée que l'on frappa à la porte. Lucrécya enjamba les piles de chaussettes et de couches sales qui jonchaient le sol de sa maison avec aisance, et bondit sur la porte qu'elle ouvrit avec un large sourire :

-MALI !!!

-MARC...Ah, encore toi, Rincevent.

Darius, qui portait encore les oripeaux qu'il avait volés lors de leur bizutage commun, jeta à son ancienne partenaire un regard torve, à travers ses cheveux ébouriffés. Derrière lui, le vieux Stan, qu'ils avaient ramené de Transylvanie, agita la chaussette qu'il portait à la main en guise de salut, un large sourire aux lèvres avant de se mettre à disserter avec le vêtement.

-Où est Flynn, je te prie ? fit Darius de sa voix traînante.

Lucrécya pinça les lèvres :

-Il est pas là. Tu devrais pas rejoindre "l'Amour de ta vie" plutôt que de chercher mon mari ? cracha-t-elle. Tu sais, la chose blonde et aigrie qui s'appelle Vilénie ?

A l'entente de ce sobriquet peu flatteur, un sourire passa furtivement sur le visage de Darius. Il se reprit cependant :

-Certes...

-C'est qui, Vilénie ? demanda le vieillard derrière lui.

Le silence retomba, et Darius et Lucrécya se considérèrent, un peu gênés. Le blondinet reprit la parole :

-Bon, et bien, puisque Flynn n'est pas là, je vais y aller. Je vais amener ce vieil homme à l'Administration, ils sauront quoi en faire.

Lucrécya leur referma la porte à la figure :

-Oui, c'est ça, casse-toi, Lestrange.

Darius, et un sorte de vieillard malodorant et un peu sénile qui parlait à une chaussette, transplana. Dans le buisson où elle s'était précipitée, Malicia soupira, soulagée. Elle émergea hors de l'arbuste, des feuilles plein les cheveux.
Elle n'avait pas imaginé une seconde croiser son ex chez son amie. Elle n'avait pas imaginé non plus qu'il apparaîtrait devant elle, à à peine 10 centimètres, juste après qu'elle ait toqué.

Elle avait souvent imaginé le moment où elle le croiserait seul à seul, ces deux dernières semaines. Ses soeurs Zeta l'y avaient préparé et elle avait juré qu'elle se conduirait avec décence, et lui ferait bien sentir tout le mépris qu'elle avait pour lui. Et voilà que lorsque ce dernier avait transplané juste devant elle, la seule chose qu'elle avait été capable de faire, c'était de se jeter dans les fourrés, comme un vulgaire sachet de Fizwizbiz vide.

Elle remit de l'ordre dans ses habits, un peu honteuse et toqua. La voix de Lucrécya se fit entendre :

-Si c'est encore, toi Darius, Marcus est toujours pas rentré ! Barre-toi !

-Mais Lulu, c'est moi ! fit Mali de sa voix aigüe.

La porte s'ouvrit et son amie apparut dans l'embrasure, un large sourire aux lèvres et les bras en l'air:

-MALI !

Malicia leva les bras, souriant également :

-LULU !

-MALI !

-LULU !

-MALI !

-LULU !

-MALI !

-IIIIH !

-IIIIH !

Les deux filles tombèrent dans les bras l'une de l'autre.

-OH TU M'AS TANT MANQUÉ ! Si tu savais !

-Euh Lustucru... !

-Jamais plus je ne te laisserai ! Toi et moi, c'est pour la vie !

-Euh Lustucru...

-C'était si horrible sans toi... Si seulement je t'avais eu à mes côtés, ça aurait été tellement différent, j'aurais pu surmonter n'importe quelle difficulté !

-Euh... Lustucru ?

Lucrécya releva la tête :

-Moui, Mali ?

-Et moi, je t'ai pas manqué ? fit la métisse d'une petite voix enfantine.

L'ex-Serpentard, qui était en train de câliner à outrance sa baguette (que son amie, à sa demande, lui avait ramené d'un simple accio), leva les yeux au ciel.

-Mais si, bien sûr !

Elle donna une grande claque amicale dans le dos de Malicia.

-Bon, attends-moi là, j'ai vraiment besoin d'une douche ! Je ne supporte plus ma propre odeur ! Tu bouges pas, hein ?

Cette dernière hocha la tête, en souriant. Elle reconnaissait bien là son amie. Elle chercha des yeux un endroit où s'asseoir dans le salon, en vain évidemment. Dépitée, agita sa baguette rose : l'appartement se mit à se ranger tout seul.

Puis elle s'affala sur le canapé désormais libéré de tout bazar, et sortit de la poche de son long manteau un sachet d'oursons Miamiam en nougatine.

Très vite, Lucrécya la rejoignit, dans une jolie robe bleue nuit fraiche et propre, sa batte Séraphine accrochée à sa ceinture.

-Ah, j'ai enfin mis le feu à mes fripes de clodo ! chantonna-t-elle, fière d'elle.

Malicia jeta un œil peu rassurée vers la porte qui menait à la salle de bains, sous laquelle une épaisse fumée noire suspecte semblait sortir. Puis, elle se tourna vers son amie qui, de fines cicatrices sur le visage, des griffures sur les bras et l'air particulièrement las, lui souriait néanmoins.

Elle se jeta à nouveau dans ses bras.

-LULU !

-MALI !

-Tu m'as trop manquée !

-Moi aussi !

-Si tu savais ce que je me suis fait comme soucis ! lança l'ancienne Gryffondor en se redressant, avant de gober nerveusement une friandise. J'ai cru que tu étais morte, ou pire ! J'ai passé tout mon temps libre à te chercher partout !

-Mouais, maugréa Lucrécya. Tu pouvais chercher longtemps, on était entouré par une sorte de bouclier magique. Mais toi, dis-moi, tu sais où est Marcus ? Ou Rufus ?

-Marcus ? Il doit être avec ses nouveaux potes de la Pi Alpha Fi,tu sais, les brutos de l'université, il est tout le temps avec eux, ils sont rustres mais ils sont pas méchants au fond, ils ont retourné toute l'université pour te trouver, et pi il m'avait confié Rufus, je l'ai gardé quelques jours, mais j'avais vraiment pas le temps entre mes horribles cours, mes recherches, mon intégration dans la Zeta Delta Nu, et je t'ai parlé de mes horribles cours, mes camarades sont tous des psychopathes psychorigides, ma prof me déteste parce que c'est la tante de Mylénie la nouvelle fiancée de Drago et je me sens si pathétique et pi t'étais pas là et et et...

-Respire, Malicia ! décréta d'une voix autoritaire Lulu, coupant d'un coup la tirade suraiguë de la métisse.

Elle lui tendit un sac en papier kraft, qui traînait par là. La Zeta, en hyperventilation, s'en aida pour respirer.

-...merci Lustucru ! couina cette dernière. Y'a que toi qui sait comment calmer mes monologues hystériques !

Elle piocha un énième nounours nougatiné, et le goba tout entier, histoire de se remonter le moral.

-Et donc, Rufus ? insista la jeune maman, un brin d'inquiétude dans la voix.

-Ah oui ! Comme lui aussi il était très occupé, Marcus l'a confié à sa grand-mère.

Le sang de Lulu ne fit qu'un tour. Horrifiée, elle bondit sur ses pieds et cria :

-RUFUS EST CHEZ MA MÈRE ?!

-Non, chez la maman de Marcus !

-Ah, c'est bon alors.

Rassurée, Lucrécya se rassit, et se servit une bonne poignée d'oursons Miamiam, dans la poche que lui tendait son amie. Elle en mordit un avec précaution, comme si elle avait peur qu'il s'échappe.

En deux semaines, elle en avait presque oublié le goût du chocolat. Et de toute autre nourriture, à part les rutabagas, les cailloux et autres patates germées crues, à vrai dire.
Et y'avait pas à tergiverser : ces arômes doux et sucrés, cette nougatine croquante, cette génoise généreuse et ce cœur fondant au lait... c'était l'extase ! Un délice des papilles ! Le paradis dans un minuscule nounours ! Lulu en essuya une larme de joie.

-Bon, maintenant, raconte-moi : t'étais où ces deux dernières semaines ?! lança enfin Mali, que la curiosité dévorait.

-Ah ça ! s'exclama la brunette, les yeux ronds. C'était quelque chose ! J'étais coincée avec cette blondasse de Lestrange dans un village moldu transylvanien ! Bizutage de la Alpha Alpha Alpha ! Dingue non ?

La bouche de la métisse s'arrondit de surprise :

-Lulu ?! Tu as été admise dans la Alpha Alpha Alpha, la plus prestigieuse des fraternités de la fac ?! Wouah !

L'étudiante en Sports bomba le torse, fière d'elle :

-Ouaip ! J'fais partie de l'élite, comme j'te dis ! Ça t'en bouche un coin, hein ? Hé hé !

Mali hocha la tête, heureuse pour son amie. Puis un détail lui sauta tardivement aux yeux :

-Tu étais coincée avec Darius ?!

Lucrécya et Darius, coincés ensemble en Transylvanie ?

Le cœur de Malicia ne fit qu'un tour alors que son imagination prenait le dessus sur sa raison. Qu'avait-ils fait là-bas ? Les connaissant, ils auraient dû s'entretuer... Mais alors, pourquoi Lucrécya était-elle intacte ? Peut-être que... ohmondieuohmondieuohmondieu... toute cette haine avait forcément fini par se transformer en romance et ils s'étaient probablement enfuis en Transylvanie pour vivre leur amour loin des regards et c'était bien normal parce que Lucrécya était tellement parfaite, alors qu'elle tout ce qu'elle avait, c'était de grosses fesses et une addiction au sucre et aux bonnes notes et.... ohmondieuohmondieuohmondieu, c'était sûr Lucrécya allait se marier avec Darius et quitter Marcus et.... non mais à quoi elle pensait ?! C'était n'importe quoi !

Malicia déglutit, et se força à sourire. Non. Elle ne devait pas perdre les pédales. Elle avait passé deux semaines à essayer d'oublier Darius. Ses soeurs Zeta allait être très déçues si elles apprenaient qu'elle se souciait encore de ce sale petit bourgeois blond... mais il était si mignon, et si talentueux et si.. oh mondieuohmondieuohmondieu il l'avait plaquée et c'était sûr jamais elle ne retrouverai quelqu'un de mieux et elle finirai seule à manger des chocogrenouilles devant des séries minables et elles péserait 400 livres et...
Mali saisit un sac en papier Kraft et se mit à respirer frénétiquement à l'intérieur.

-Et là, paf! Le gros monstre tout vert et suturé m'a envoyé de l'autre côté de la pièce, mais n'écoutant que mon courage...ça va, Mali ? demanda Lucrécya.

-Voui... couina Malicia.

-C'est mon histoire qui te fait peur ? Ah lala, Mali, t'as vraiment pas l'estomac bien accroché !

Lucrécya haussa les épaules et se relança dans la narration de son périple :

-Bref et du coup, on a atterri en prison, genre un vieux cachot tout dégueu et tout sombre ! Et...

La porte d'entrée s'ouvrit brusquement et le Capitaine Flynn se précipita dans le salon, en tenue camouflage :

-MON PETIT COGNARD !!!

Lucrécya bondit sur ses pieds :

-MARCUS !!!

Elle sauta dans les bras de son mari et les deux s'embrassèrent fougueusement. Malicia sourit :

-Ça va, Marcus ?

Devant l'absence de réponse de ses amis, elle finit par se lever :

-Bon, vous avez l'air occupés, je vais y aller... Bonne soirée !

Elle quitta prestement la Maison des Flynn.

(On retrouve Lulu plus tard :arrow: ici !)

Malicia fit quelques pas dans les allées.

Autour d'elle, les étudiants sortaient de leurs derniers cours en hurlant de joie. Certains se ruaient sans attendre vers le Scroutt et Le Niffleur, le pub local, avec la ferme intention d'y noyer une semaine de souvenirs liés aux cours.

D'autres se posaient à même le sol dans le campus, la tête dans l'herbe, et soupiraient d'aise.

Malicia manqua de se faire bousculer par un étudiant totalement nu qui faisaient des roulades et poursuivit son chemin. Soudain une main se posa sur son épaule et elle hurla. Euphemia Hastings, une de ses sœurs Zeta, se tenaient devant elle, et la dévisageait de ses grands yeux bleus lunaires.

-Quelqu'un a besoin de se détendre, hein ? fit cette dernière.

-Je vais bien ! fit Malicia, dont la main se crispait déjà autour d'un sac en papier kraft.

Devant l’œil peu convaincu de sa copine, Mali prit une profonde inspiration et goba une chocogrenouille.

-Alors, tu as quoi de prévu, ce soir, Mali ? reprit Euphemia.

-Euh, plein de choses, plein ! répondit Malicia, les yeux ronds.

Elle n'avait rien prévu d'autre que de faire sa lessive, et de regarder de mauvaises comédies en mangeant un pot de glace exagérément grand. Elle pleurerait aussi sur quelques photos d'elles et de Drago, si le coeur lui en disait. Peut-être même écrirait-elle quelques pages assassines dans son journal. Ah ça, ce sale blondinet ne perdait rien pour attendre !

Mais elle n'allait pas raconter tout ça à Euphemia. Elle avait sa dignité, tout de même.

-J'ai prévu de dîner avec des amis, j'ai une merveilleuse robe que j'ai acheté pour l'occasion, et nous rirons jusqu'au lever du jour, et... mentit-elle de sa voix suraiguë.

-Si t'as rien prévu, les Zeta ont une mission pour toi. fit sa camarade.

Elle tendit à Malicia une photo sur laquelle une fille très belle et très blonde lui faisait des petits coucous.

-Lily Collins. décrivit Euphemia. Elle nous intéresse, mais il faudrait qu'on s'assure de son potentiel.

-Et qu'ai-je à voir là-dedans ? Tu veux que je l'invite à dîner ?

-Non, Mali. Tu ne vas pas l'inviter à dîner...

Euphemia murmura quelque chose à l'oreille de la métisse qui ouvrit des yeux horrifiés :

-Mais...je....je.... c'est horrible ! balbutia-t-elle.

-On pense que tu t'en tireras très bien, Mali.

-Mais... je... euh...comment je vais faire ?

-Tu trouveras... Bonne chance !

Euphemia transplana.

Malicia regarda la photo de la fille qu'elle devait bizuter. Finalement, elle releva la tête, et demanda, d'un ton peu convaincant :

-Euh, et tu es sûre qu'elle préférerait pas un bon dîner ?

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